La vie en Briançonnais aux 14e et 15e siècles

Ces extraits sont tirés de la thèse de Robert Chanaud :  Le Briançonnais aux 14e et 15e siècles. Aspects de la vie économique - 1974.

L’étude des révisions des feux (de 1434 à 1447) dépouillées pour le travail de thèse de R. Chanaud en 1974 donnent des aperçus sur la vie quotidienne des Briançonnais de cette époque.

 

Climat, travail et misère

 

Le climat briançonnais est particulièrement rude à cette époque.

À Val-des-Prés et Montgenèvre, il y a de la neige pendant 8 mois et demi, de ce fait les blés sont souvent détruits.

À Cervières, il arrive qu’il neige en mai ou juin sur les épis, ou en août-septembre avant la récolte.

 

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L’élevage est affecté par l’âpreté du climat, car le bétail ne peut paître que pendant la moitié de l’année, comme à Névache.

 

Vers 1445-50 les hivers ont été très rigoureux ; il a neigé à Val-des-Prés en mai 1447 et ce genre de catastrophe était fréquent depuis une dizaine d’années.

À Césane, on a récolté à peine ce qu’on avait semé (1447).

 

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Vers Exilles où la vigne est importante, les fruitiers et les vignes depuis 14 ans n’ont presque rien donné et le blé n’a fourni qu’à la moitié ou au tiers des besoins (1447).

Les ruynes, éboulements ou coulées de boue, provoqués par les pluies brusques et torrentielles du climat méditerranéen constituent la principale calamité frappant le Briançonnais des 2 versants.

Contre un autre excès du climat, la sécheresse, les Briançonnais ont une arme efficace ; l’irrigation. Chaque paroisse possède au moins un béal ou canal. Certains de ces canaux étaient longs : à Puy-Saint-Pierre et Puy-Richard il fallut employer 500 hommes pour un béal de 2 lieues et demie. Or au 15e siècle ces ouvrages sont souvent détruits par les ruynes.

Les labours se faisaient avec l’araire tiré par des animaux ou même les femmes des paysans, plus souvent à la houe.

Le foin est coupé à la faux. Les meilleures terres étaient fauchées 2 fois, les prés de qualité moyenne, jusque vers 2000 m, une seule. Le foin d’altitude était engrangé sur place, puis descendu quand nécessaire.

Pendant les 7 à 8 mois où la culture est impossible, les habitants s’adonnent à l’artisanat. On a cité des redevances payées en écuelles ou gobelets de bois. Mais la principale activité est textile : à Cervières les femmes passent leurs nuits à filer la laine (1434 V).

La pénurie en hiver, quand les jardins ne produisent plus rien, conduit les plus pauvres à envoyer leurs enfants mendier. (1434).

                                   

L'alimentation

 

Les Briançonnais de la fin du Moyen Âge vivent essentiellement de seigle. Le froment est rare à ces altitudes et les paysans qui en récoltent préfèrent le vendre. Le seigle est bien adapté au climat montagnard et est panifiable. L’avoine, toujours présente est sans doute consommée sous forme de bouillies, ou mélangée au seigle pour faire du pain.

 

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Là où elles existent les châtaignes constituent un appoint considérable.

 

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Les noix sont plus rares et doivent servir à la fabrication d’huile. Dans le Valcluzon (1434), à Cervières (1434), à Névache (1437), on se nourrit essentiellement de lait et de fromage. En Valpute (Vallouise aujourd’hui), les habitants vivent de pain, d’avoine et de fèves. Quant à la viande, dans une région d’élevage omniprésent, on sacrifiait de temps en temps un agneau. Certains faisaient venir des fruits, probablement d’Exilles.

 

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La consommation de vin était faible.

Dans l’ensemble la nourriture paraît donc assez variée : des céréales, panifiées ou non, parfois des châtaignes, quelques fruits, beaucoup de lait et de fromage, un peu de viande salée et très peu de vin. Restait le problème de la quantité !

 

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Les vêtements

 

En montagne le vêtement est une nécessité presqu’aussi vitale que la nourriture. Dans l’enquête de 1385 qui a suivi le pillage par les soldats de la vallée du Valcluzon les vêtements sont mentionnés : plus de 20 chemises, une dizaine de tuniques généralement noires, des sandales et des souliers, plusieurs draps de lit, du cuir, de la toile de lin, du drap blanc et noir que les hommes d’armes ont utilisé pour se garantir du froid.

On fait la lessive une fois par an. Les lits garnis de draps sont rares ; on couche dans des peaux de chèvres cousus ensemble, qu’on ne peut nettoyer et qui servent à plusieurs générations.

 

 

Les maladies

 

Malgré cette absence d’hygiène, la condition physique des Briançonnais était plutôt bonne. Tuberculose et maladies infectieuses étaient rares grâce à la sécheresse du climat. Par contre, goître et idiotie sévissaient, et les difformités étaient fréquentes.

C’est, en 1434, très visible à Saint-Chaffrey où les anomalies étaient nombreuses : un tiers des feux comptait parmi ses membres un individu anormal. En 1460 - 61 la situation n’avait guère évolué : la paroisse comptait 29 sourds ou muets.

 

Boiteux Chapelle saint antoine à Jouvenceaux

 

Service du Patrimoine - Véronique Faucher d'après : Le Briançonnais aux 14e et 15e siècles. Aspects de la vie économique. R.Chanaud - 1974. 

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