Pierre TERMIER, le "géopoète" chantant l'âme de la Montagne.
Sa vie est un brillant voyage scientifique et littéraire jusqu'en Corse, au Maghreb, avec les Alpes comme passion. Il est qualifié du néologisme géopoète1 par ses confrères.
Né en 1859 à Lyon d'un père voyageur de commerce et d'une mère ouvrière de la soie, Pierre reçoit une éducation qui lui fait apprécier autant les lettres que la science.
Un Maître-Géologue reconnu, passionné, avec la Terre en partage.
À 18 ans, il entre à l'École Polytechnique et en sort premier de promotion en 1880. En 1885, il est professeur de Géologie, Minéralogie et Physique à l'École des Mines de St-Étienne et en 1894 à celle de Paris. En 1909, il est nommé à l'Académie des Sciences et devient directeur du Service de la Carte Géologique de France en 1911.
Pierre aime l'enseignement, il sait que le rôle du Professeur n'est pas seulement d'instruire la Jeunesse, de lui faire aimer la Science, mais aussi de les faire progresser ensemble et pour toute l'Humanité. Il effectue de nombreuses tournées dans les Alpes, son terrain de jeu par excellence. Pour lui, trois choses valent la peine de vivre : les beaux vers, les intégrales élégantes et les rudes escalades... Il nous le prouve partout et toujours.
Un romantique alpin, contemplatif de la Nature, à la flamme oratoire.
Parmi les belles et grandes choses de la Terre, dit-il, ce sont les Montagnes (...), les nobles et puissantes montagnes, qui parlent le plus (…) aux hommes de stabilité, d'immutabilité, de pérennité.
Pierre a pour prédilection les Grandes Alpes de Briançon, contrée de montagnes si claires, colorées et variées, tantôt douces et fleuries, tantôt dessinées avec hardiesse, sous l'azur triomphal de leur ciel ! Comme il a su le chanter, ce pays (…), dans ses courses d'élèves, en des accents qui s'envolaient au vent, dans le soleil et qui (…) sont gravés dans notre cœur (…), dit en son nom un collègue lui rendant hommage, comme un roc de 3 078 m, un col, un couloir nommés Pierre Termier dans le massif du Galibier.
Pierre sait maintenant que la structure des Alpes françaises se trouve (…) dans les montagnes entre Briançon et Vallouise2, ce qu'il démontre dans un vibrant mémoire.
Un homme courageux face aux épreuves et donnant une leçon de Vie.
Pierre scelle une union heureuse avec Alice en 1883 mais de trop courte durée : il devient veuf, entouré de leurs sept enfants, mais leurs deux fils succombent aussi... Il s'éteint d'une affection pulmonaire en 1930 à Grenoble, de retour de mission d'étude.
Maître de la tectonique des plaques, de la structure rocheuse de la Terre et des mouvements tangentiels de la chaîne alpine qu'il sacre en charriages, Pierre Termier surpasse l'adversité personnelle et transcende le sens et la valeur collective que nous apporte de don de la Vie sur Terre.
C'est en cela que son enseignement passionné réconforte et reste d'une étonnante modernité pour comprendre la Terre avec bienveillance, plus de 100 ans après.
Pour garder en mémoire et actualiser la part de patrimoine que Pierre Termier représente à Briançon, une mise en valeur du square éponyme en parcours géologique et ludique par la Ville, en lien avec la Maison de la Géologie, est un projet culturel et scientifique à réaliser, ce qu'il aurait aimé pour les Briançonnais et les visiteurs !
1 - De cette promenade dans mon jardin étrange et de ce colloque avec les sphinx qui le peuplent, je voudrais que quelque chose d'important restât à chacun de vous : tout d'abord (…) une estime extraordinaire pour la géologie (…) ; ensuite, un goût plus vif pour tout ce qui est mystérieux, (…) science, (…) compréhension (…) ; enfin, une conception plus haute de l'immense dignité de l'âme humaine, (…) plus grande assurément que tous les mondes de l'univers visible, puisqu'elle les embrasse d'un seul coup d'œil, qu'elle a conscience de leur caducité et de leur brièveté et qu'elle les plaint de n'être point éternels. (Pierre Termier, À la Gloire de la Terre, 1922).
2 - En résumé, les Alpes s'articulent ici autour d'une épine dorsale composée de granites (cristallins) de l'ère Primaire et durs, le massif central des Écrins, en bordure duquel alternent des écailles de schistes (lustrés), des arêtes de calcaires (dolomitiques) du Secondaire et moins dures, des lambeaux houillers (carbonifères) du Primaire et tendres. Issu de vieux massifs et d'une ex-mer intérieure, le Briançonnais rajeunit au Tertiaire par tectonique de la plaque africaine percutant l'européenne, avec plissement alpin généralisé à failles, charriages, chevauchements et glaciers modelant l'axe Nord-Sud haut-durancien.
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Service du Patrimoine - Michel CHIVALIER